Parapluie de rigueur en ce samedi matin sous un ciel bas et lourd. « Du jamais-vu depuis au moins 10 ans », nous dit-on. La musique folklorique du aragonais Los Gaiteros invité pour l’occasion peine à réchauffer l’ambiance. « D’habitude à cette période, c’est l’été indien ». Les touristes qui ont bravé la météo, s’abritent sous les auvents des étals de fromage des 16 producteurs locaux. Les plus heureux à cette heure sont ceux qui ont pensé à s’inscrire à l’avance à la dégustation du fromage et du jurançon organisée par des bergers et un œnologue, et qui se déroule dans la salle municipale, au sec.
Sous la halle, le concours de fourrage attire les curieux. On y apprend qu’un technicien doit, pour apprécier la qualité d’un fourrage, y mettre son nez, comme une brebis. Dans les rues paillées, les buvettes couvertes font, elles, le plein : on y sert, avec des châtaignes, le « bourret », ce jus de raisin fermenté, qui se boit au moment des vendanges. Les restaurants se remplissent dès 11 h 45. Il faut dire que la poule au pot semble tout à fait de saison. À l’Arrégalet, le chef est « coq et chevalier de l’ordre de la poule farcie », un titre qui n’est pas usurpé. Les musiciens ossalois ont quant à eux renoncé à jouer dehors et préfèrent animer les restaurants, quand les Aragonais persévèrent à essayer de faire danser une foule frileuse.
Dimanche matin
Les parapluies sont fermés et on a du mal à circuler dans les ruelles encombrées. On se déplace en effet de toute la vallée pour encourager la quarantaine de participants au « concours du meilleur fromage de brebis fabriqué en Ossau ». Les tommes, 25 par candidat, s’empilent sur les tables disposées sous la halle. Pas moins de 1 000 d’entre elles changeront de main au cours du week-end. La manifestation fut longtemps un comice où les bergers venaient vendre leur production aux grossistes ; aujourd’hui l’enjeu est plus affectif que commercial. Si tous se claquent la bise lors de l’installation des tables, la tension monte au fur et à mesure que la matinée avance. Il y aurait bien un peu de compétition dans l’air. On raconte même que ceux qui perdent font grise mine. Les commerçants, eux, ont retrouvé le sourire. On danse et on chante dans les rues. L’année prochaine, c’est sûr il fera beau.