Biarritz, histoire cousue mains

Pendant près de trois siècles, Biarritz a attiré les plus grands noms de la haute couture. Si les concept stores de la rue Gambetta ont remplacé les quelque 25 maisons de couture qui ont habillé les riches élégantes en villégiature, le goût de la station balnéaire pour la mode est resté intact.
 
Nathalie Beau de Loménie a grandi dans les anciens salons d’essayage de la maison « Germaine Couture Sport », créée par sa grand-mère en 1921, dans la lignée de Chanel, Rochas et Jean Patou. Elle a plongé dans les souvenirs familiaux pour raconter l’histoire de la haute couture et de la mode sur la Côte basque. Résultat : un superbe ouvrage paru cet été aux éditions Atlantica, qui compile avec bonheur anecdotes, documents d’archive et photos d’époque.
 
Villégiature impériale
BiarritzOn y apprend que ce sont Eugénie et Napoléon III qui ont lancé la mode de Biarritz au XIXe siècle. Dans leur sillage, le petit village devient une station balnéaire tendance, qui attire têtes couronnées, aristocrates et haute bourgeoisie. Une clientèle pour les succursales des grandes maisons de couture parisiennes et les couturières locales. Worth est le premier à s’y installer en 1891, suivi de Doucet, Poiret et, à partir de 1915, de Chanel, qui n’est pas encore devenue l’illustre Coco. Tout droit venue de Paris, la jeune Germaine Michel arrive, elle, en 1919. Elle achète une maison avenue Carnot pour y ouvrir « Germaine Couture Sport ». Pour se faire connaître, l’audacieuse couturière n’hésite pas à aller démarcher les riches clientes dans leurs villas. La princesse de Wagram, la marquise de Portago ou la duchesse de Montebello vont se succéder dans ses salons d’essayage. Elle emploiera jusqu’à 180 ouvrières et enverra sa fille Michèle Long-Savigny, la mère de l’auteur, dans la première école de mannequinat.
 
BiarritzTrépidantes Années folles
À l’acmé de la Belle Époque, puis pendant les Années folles, Le tout-Paris aime à se divertir à Biarritz. Le casino Bellevue et celui de la Grande Plage se font concurrence à coups de cocktails, de soirées, de bals et de concerts. Les grands magasins « Biarritz Bonheur » et « Au bon marché de Biarritz » s’installent. C’est aussi l’époque des concours d’élégance automobile. L’occupation puis la banalisation du prêt-à-porter mettront un coup d’arrêt à cette activité trépidante. Nombreuses seront les maisons de couture à fermer. Biarritz perd alors de son attrait.

  
Le renouveau
Biarritz« C’est finalement le surf et le cinéma qui donneront un second souffle à la station balnéaire », dévoile Nathalie Beau de Loménie. Les stars et les artistes remplacent les têtes couronnées. Le Waikiki, premier surf club voit le jour en 1960, année des épreuves du premier championnat de France. On voit sur la plage Catherine Deneuve prendre, entre deux prises, son premier cours de surf avec Joël de Rosnay. Une nouvelle mode décontractée influencée par les codes américains est lancée. Les grandes entreprises de sportwear, comme l’Australien Quicksilver, investissent la côte. Aujourd’hui, Biarritz est redevenue une vitrine chic et glamour qui continue d’inspirer les créateurs. Albertine imprime la Grande Plage sur ses maillots, Comb’hard et Cestus revisitent le néoprène et les luxueuses montres March LA.B. allient héritage historique et modernité. On y cultive plus que jamais son apparence.

Biarritz et la mode, La haute couture et la mode sur la Côte basque de 1854 à nos jours, Nathalie Beau de Loménie, éditions Atlantica, 280 p., 28 €.

Chanel et Biarritz
L’histoire de Chanel est intimement liée à celle de la station balnéaire. Gabrielle y ouvre sa première maison de mode en 1915. Dans son atelier de la villa Larralde, elle embauche sur place près de 60 ouvrières pour son premier « Chanel salon mode ». Il attirera les élégantes des deux côtés de la frontière jusqu’en 1939. Si Karl Lagerfeld a conservé peu de temps la maison qu’il possédait à Biarritz, il a néanmoins souhaité rendre hommage au surf dans sa collection 2012. Le longboard aux deux C entrelacés est devenu iconique.